Travail à l’ordinateur et troubles musculo-squelettiques

Article rédigé par Michel Forget, conseiller en santé et sécurité du travail
paru dans Magazine L’Expertise – Mars 2014

 

Le travail à l’ordinateur, bien que très sédentaire, est fréquemment associé à des troubles musculo-squelettiques (TMS). Ce type de travail impose une posture statique et des gestes répétitifs sur de longues périodes.

Des statistiques récentes indiquent « que pratiquement 70 % des travailleuses et travailleurs québécois rapportent utiliser un ordinateur dans le cadre de leur emploi principal ». Pour sa part, la CSST mentionnait qu’en 2000 elle a consacré pas moins de 500 millions de dollars à l’indemnisation de travailleurs souffrant de TMS, ce qui représentait plus de 40 % des coûts d’indemnisation des lésions professionnelles. Au Québec, en 2012, les TMS représentaient 27,6 % des lésions professionnelles et, dans le secteur de l’Administration publique, ils constituaient 36,7 % des lésions et 39, 6 % des débours.

 

LES CAUSES DES TMS

L’expression « troubles musculo-squelettiques » est le plus souvent utilisée pour qualifier des malaises, des douleurs et des inconforts importants aux articulations (tendons, disques, ligaments) et aux tissus mous des membres supérieurs. Dans le langage de tous les jours, on parle de maladies en « ite » (épicondylite, bursite, tendinite). Dans le cas du travail à l’ordinateur, ces lésions sont associées au maintien d’une posture statique où certains muscles sont contractés durant de longues périodes. À ce moment – et, souvent, sans que l’on s’en rende compte –, les muscles du cou, des bras, des poignets et des mains sont tendus et la circulation sanguine est alors entravée. Cette situation favorise l’accumulation d’acide lactique et freine l’élimination des déchets métaboliques. Progressivement, une situation d’inconfort s’installe, suivie d’une fatigue et, éventuellement, d’une douleur. Le développement d’un TMS est un processus qui évolue lentement et, si rien n’est fait pour remédier aux contraintes de travail qui en sont à l’origine, la lésion s’installe et se chronicise.

Concernant le travail à l’écran, il existe actuellement un large consensus dans la communauté scientifique selon lequel le maintien de postures contraignantes et statiques associé à des aménagements inadéquats des postes de travail, à des répétitions de mouvements (clics de souris, déplacements fréquents du curseur, saisie importante de données au clavier) et à une charge de travail élevée et stressante sont des facteurs déterminants favorisant l’apparition des TMS.

 

L’AMÉNAGEMENT DE L’ESPACE DE TRAVAIL

Pour réduire les risques inhérents au travail à l’écran, il est important de bien aménager son poste de travail et, éventuellement, de santé et sécurité. Si rien n’est fait pour remédier aux contraintes de travail qui en sont à l’origine, la lésion s’installe et se chronicise.

Modifier certaines de ses habitudes de travail. Voici quelques indications à cet effet. Plus d’information est également disponible sur le site de l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail – secteur Administration provinciale (APSSAP) au http://apssap.qc.ca. Le système d’apprentissage en ligne Adapte peut aussi vous aider à ajuster votre poste de travail : www.adapte.ca.

  • Le réglage de la chaise de travail : Réglez le niveau de la hauteur de l’assise de la chaise sous le niveau de la rotule de sorte qu’une fois assis devant l’écran vos pieds soient en tout temps bien en appui à plat sur le sol. Réglez également l’inclinaison de l’assise de la chaise de façon à ce que les cuisses soient parallèles au sol et que vous ayez l’arrière des genoux dégagé. Pour ce qui est du dossier, ajustez sa hauteur, sa tension et son inclinaison de façon à ce que le dos, et particulièrement le bas du dos, soit droit et bien appuyé. Réglez enfin les accoudoirs (hauteur et largeur) de façon à ce que les bras soient en appui et que les épaules soient détendues. Les coudes doivent alors être au même niveau que le clavier.
  • Le clavier et la souris : Assurez-vous de placer le clavier et la souris à une hauteur telle que les poignets sont droits et que les mains sont en ligne droite avec les avant-bras. Évitez les situations où l’on a les poignets cassés, soit en extension vers le haut ou en flexion vers le bas, de même que celles où les mains sont en déviation cubitale (tournées vers l’extérieur) ou radiale (tournées vers l’intérieur).
  • Le moniteur : Placez-le à une distance de lecture confortable à environ la longueur d’un bras et à une hauteur qui fait que le haut de l’écran est au niveau des yeux. Veillez également à éliminer les reflets sur l’écran. Reposez de temps en temps vos yeux en regardant au loin.
  • Organisation du travail : Prenez des pauses courtes et fréquentes. Cela aidera à votre concentration et préviendra divers problèmes liés aux tâches répétitives. Pour soulager les inconforts occasionnés par le statisme de la position assise et pour prévenir la compression des disques de la région lombaire, faites de courtes séances d’exercices (4 fois deux minutes et demie par jour) qui associent mobilité et étirement. Voir à cet égard le site de l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail – secteur Affaires sociales (ASSTSAS) au asstsas.qc.ca.

 

CONSULTER SON MÉDECIN

Quand un problème musculo-squelettique se chronicise, il faut consulter un médecin. À cet égard, pour faire reconnaître un TMS par la CSST, il est plus qu’important de bien informer son médecin traitant des tâches accomplies, pour que celui-ci soit en mesure d’évaluer si le TMS est ou non lié au travail.

Pour ce faire, il importe de bien lui décrire votre environnent de travail et, à cet égard, la prise de photos de vous installé à votre poste de travail peut être fort utile. Vous devez lui préciser la nature de vos tâches et le temps que vous passez à l’ordinateur. Il faut également que vous soyez en mesure de lui situer dans le temps quand et comment (progressivement ou subitement) vos symptômes sont apparus ainsi que comment évoluent les douleurs quand vous n’êtes pas au travail (la nuit, les fins de semaine et durant les vacances).

En conclusion, il importe de retenir qu’en matière de TMS la prévention est de beaucoup préférable. Comme le travail à l’écran est devenu incontournable, il faut accorder une attention particulière à l’adaptation ergonomique de son poste de travail, et ce, bien avant que n’apparaissent des inconforts et des douleurs.