Par José-Frédérique Biron
L’enjeu du climat était à l’honneur à la fin de l’année 2022 lors de la 27e Conférence des parties (COP) sur les changements climatiques à Charm el-Cheikh, en Égypte, en novembre, et de la COP15 sur la diversité biologique à Montréal, en décembre. Il est rare que deux conférences des parties se suivent d’aussi près et retiennent autant d’attention médiatique.
Puisque la COP15 se déroulait au Québec, le SPGQ a décidé d’y prendre part à titre d’observateur afin de sensibiliser les participants et participantes aux enjeux de biodiversité et de mieux leur faire comprendre les réalités de certains de ses membres, par exemple les biologistes, les agronomes, les chimistes et les autres scientifiques du gouvernement du Québec.
Le Syndicat a également profité de l’occasion pour créer des alliances avec des organisations de la société civile et pour raffiner ses réflexions sur la transition juste.
COP27 : entre victoires et déception
Le SPGQ n’a pas participé à la COP27, mais d’autres organisations syndicales et de la société civile québécoise avec lesquelles il collabore y ont assisté et ont partagé leur bilan.
La COP27 visait principalement à fixer les balises économiques pour les préjudices et les pertes que vivront les pays du Sud global qui seront touchés majoritairement par les changements climatiques. Ironiquement, alors que les pays riches du Nord global sont responsables de la majorité des émissions de gaz à effet de serre causant les changements climatiques, ils se sont opposés, jusqu’aux deux dernières journées de la COP27, aux demandes des pays les plus touchés par les changements climatiques.
Lors des précédentes COP sur le climat, la question de la transition juste a été défendue par le mouvement syndical international. Elle vise à défendre et à prendre en considération les perspectives et les intérêts des travailleurs et travailleuses dans le cadre des changements et des évolutions nécessaires dans les milieux de travail afin de répondre au défi énorme que constitue la transition environnementale.
À cet effet, la COP27 a permis d’établir un programme de travail sur la transition juste centré sur le dialogue social et sur la protection sociale des travailleurs et travailleuses subissant les effets des changements climatiques ou sur l’abandon de certaines industries polluantes. Les syndicats réclament une présence autour de la table pour discuter de transition afin de porter la voix des travailleurs et travailleuses. L’intégration de la protection sociale est une revendication historique du mouvement syndical défendant la transition juste. En effet, elle permet d’assurer une meilleure résilience des personnes employées, de leur famille et, de manière plus large, de leur communauté.
Malgré cette avancée, le mouvement syndical international est déçu de ne pas avoir obtenu d’engagements concernant le respect des droits du travail et des droits de la personne. Les droits d’association, de négociation collective, de santé et sécurité au travail, par exemple, sont essentiels pour assurer une transition juste. Malheureusement, les pays participant à la conférence étaient frileux à l’idée de s’engager formellement sur cette question. Il est certain que le mouvement syndical mondial continuera à réclamer des engagements concrets en la matière lors des prochaines COP sur le climat.
COP15 : négociations sur fond de tensions
En ce qui concerne la COP15, l’objectif principal de cette rencontre était d’adopter le Cadre mondial de la biodiversité. Puisque le Plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020 tirait à sa fin, un nouveau plan devait être élaboré.
L’agenda de la rencontre était très ambitieux : obtenir un cadre mondial de la biodiversité pour « l’après 2020 » doté de cibles, d’objectifs, de mécanismes de mise en œuvre (p. ex., le financement par la création d’un fonds d’aide à la conservation de la biodiversité) ainsi que de mécanismes d’examen. De plus, d’autres décisions étaient attendues concernant l’accès et le partage des avantages liés à l’utilisation du matériel génétique, la biosécurité, la biologie synthétique et la gestion des risques. Selon les dires mêmes du ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, cette COP devait mener à une proposition de cadre mondial aussi mobilisatrice pour la COP sur la biodiversité que l’a été l’Accord de Paris sur le climat.
« L’humanité est une arme de destruction massive contre la nature. […]
– António Guterres, secrétaire général des Nations unies
Oublions les rêveries de certains milliardaires : il n’y a pas de planète B. […]
Il faut signer un pacte de paix avec la nature. »
M. Guterres a réclamé trois actions concrètes :
- Concevoir des plans d’action nationaux impliquant tous les ministères et segments de l’économie de la part des gouvernements nationaux et infranationaux;
- Pour les entreprises et les investisseurs, devenir des alliés de la nature, plutôt que des ennemis de celle-ci;
- Offrir du soutien financier de la part des pays du Nord global à l’égard des pays du Sud global, qui sont les principales victimes des changements climatiques et, donc, de la destruction de leur biodiversité.
L’accord finalement conclu reconnaît notamment un rôle fondamental aux peuples autochtones en tant que gardiens et protecteurs des terres et des eaux. En effet, bien que les terres autochtones représentent 20 % de la superficie de la planète, elles recèlent à elles seules près de 80 % de la biodiversité mondiale restante. Ces peuples font la gestion des populations et des écosystèmes avec une efficacité avec laquelle peu d’États sont en mesure de rivaliser.
Cet accord reconnaît également la place des gouvernements locaux et régionaux parmi les leaders. Certes, les pays se sont engagés nationalement, mais les solutions demeureront locales et devront être adaptées aux communautés et à leur contexte spécifique.
Afin de soutenir les efforts de conservation dans les pays en développement, lesquels recèlent une très grande biodiversité, le Cadre mondial de la biodiversité prévoit également la création du nouveau Fonds mondial pour la biodiversité. Ce fonds permettra de reconnaître les torts et les pertes causés par l’exploitation et par l’extraction des ressources par les pays du Nord global, lesquels financeront ledit fonds. Évidemment, comme tout accord mondial, la réalisation des engagements dépendra de sa mise en œuvre aux échelles locale et nationale.
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