Résistances féministes et urgences climatiques

De génération en génération, dans la rue ou dans l’espace privé, des féministes luttent tous les jours pour faire respecter leurs droits. D’une riche diversité, alimentées par leur colère et nourries par leur sororité, elles s’unissent – ne veulent plus négocier – et ne resteront certainement pas silencieuses. L’urgence climatique fait partie des enjeux actuels qui interpellent les féministes dans la pluralité des résistances qui les animent. 

De par leurs impacts environnementaux néfastes, certains projets accentuent la crise climatique et creusent les fossés entre les femmes et les hommes, ainsi qu’entre les femmes elles-mêmes. Des liens existent entre la pauvreté chez les femmes – plus grande que chez les hommes – et l’augmentation de leur vulnérabilité face aux changements climatiques, notamment les canicules.

Les catastrophes naturelles diminuent leur espérance de vie et augmentent leur stress en raison de leur statut socioéconomique, de la division genrée du travail et de leur rôle traditionnel de dispensatrices de soins. Plusieurs études de cas à l’occasion d’épisodes climatiques extrêmes ont aussi démontré une augmentation de la violence envers les femmes, notamment en milieu familial.

L’écoféminisme

Les impacts des changements climatiques sont encore plus grands sur les groupes de femmes exposées à un croisement de discriminations. Elles sont en effet plus susceptibles d’avoir une situation d’emploi précaire, de rencontrer des embûches dans l’accès aux soins de santé et aux services sociaux ainsi qu’à une alimentation saine, basée sur des produits de qualité et accessibles à proximité. Fondamentalement, il faut reconnaître l’existence de liens entre la domination sur les femmes, les peuples colonisés ou racisés et celle sur la nature. La résistance apparaît comme une évidence face au duo capitalisme-patriarcat qui prend toute la place: politique, économique, médiatique, etc. L’écoféminisme nous invite à repenser nos relations avec la Terre et sa population. Mais encore faut-il prendre conscience des changements systémiques nécessaires à implanter.

Cette analyse de l’impact des enjeux climatiques sur l’ensemble des femmes n’est malheureusement pas faite systématiquement par le gouvernement du Québec. Elle est pourtant nécessaire à la mise en place de mesures d’atténuation des inégalités à toutes les étapes d’un projet, de sa préparation à son évaluation. Nos gouvernements ont tous les outils pour mener une analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle (ADS+), mais leur volonté politique reste à prouver.

Engagement

Le gouvernement du Québec doit également respecter l’engagement pris lors de la signature de la Déclaration et du Programme d’action de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes à Beijing en 1995. En refusant d’adopter une motion dans le cadre du 8 mars, l’Assemblée nationale a rejeté une occasion de reconnaître la multiplicité et la diversité des luttes féministes au Québec. Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement choisit sciemment de continuer d’ignorer les luttes féministes.

M. Legault, Mme Biron, nous vous interpellons pour que l’ADS+ soit appliquée en amont dans tous les ministères et organismes gouvernementaux.

Nous défendons les droits de toutes les femmes, ici et ailleurs. Puisque le Québec fait partie des responsables de la crise climatique, il doit assumer ses responsabilités envers les populations les plus durement touchées, dont les femmes à la croisée d’oppressions. Il est temps d’agir.

Le Collectif 8 mars est composé d’organisations syndicales et d’organisations féministes d’action communautaire autonome représentant près de 800 000 femmes, 17 tables régionales de concertation en condition féminine et plus de 450 groupes de femmes et mixtes.

Marie-Andrée Gauthier, coordonnatrice générale, RTRGFQ
Nathalie Arguin, secrétaire générale, CSN
Jessica Bourque, 2e vice-présidente, SPGQ
Maryève Boyer, vice-présidente représentant les femmes, FTQ
Line Camerlain, 1re vice-présidente, CSQ
Karine Drolet, présidente, RTRGFQ
Johanie Dupras-Renaud, responsable provinciale à la condition féminine, CSD
Sandra Etienne, 4e vice-présidente, APTS
Femmes de diverses origines (FDO)
Fédération des femmes du Québec (FFQ)
Nathalie Garvin, vice-présidente condition féminine, SFPQ
Mélanie Hubert, présidente, FAE
Françoise Ramel, vice-présidente, FIQ