Négociation : les grands enjeux du SPGQ 

Par Anouk Frenette-Tremblay et Christine Joyal, conseillères en relations du travail et à la négociation 

Qu’est-ce qu’un enjeu transversal en négociation collective? La question est simple, mais plusieurs réponses sont possibles. On peut affirmer sans se tromper qu’un enjeu transversal est généralement un enjeu fondamental de la négociation collective. Il peut être lié à la structure de la négociation, à l’évolution de l’interprétation juridique, aux changements législatifs, au contexte social ou aux enjeux vécus par les membres dans leur milieu de travail. 

De manière générale, la négociation collective dans les secteurs public et parapublic est composée des paliers locaux, sectoriels et intersectoriels. Par exemple, pour la fonction publique, les collèges et l’Institut national de psychiatrie légale Philippe-Pinel, c’est à la table intersectorielle que le gouvernement présente les offres portant sur la rémunération, sur le régime de retraite, sur les congés parentaux et sur les disparités régionales.  

Ainsi, les matières intersectorielles constituent des enjeux transversaux. Toutefois, ce ne sont pas les seuls enjeux fondamentaux que le SPGQ met de l’avant lorsqu’il entame une ronde de négociation. 

Le SPGQ négocie présentement des modalités visant à protéger les victimes de violence conjugale, familiale ou sexuelle à toutes les tables. Pourquoi? Parce que la violence conjugale ne s’arrête pas au seuil de la maison et l’employeur doit, depuis l’adoption de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, prendre des mesures lorsqu’il sait ou devrait raisonnablement savoir qu’une personne est exposée à de la violence. 

Bref, un enjeu transversal est un enjeu d’importance qui sera abordé à la majorité des tables de négociation. 

Quels sont les enjeux transversaux des négociations collectives actuelles? 

Peu importe la structure de la négociation, le salaire est un enjeu prioritaire à l’ensemble des tables de négociation. Cet enjeu est d’autant plus fondamental cette fois-ci en raison du contexte économique difficile.  

L’inflation, qui est montée en flèche dans les derniers mois, a des impacts directs sur le budget des ménages et sur leur pouvoir d’achat. Les prix des propriétés ont aussi grimpé rapidement au cours des dernières années, rendant l’accès à la propriété très difficile, voire impossible dans plusieurs municipalités du Québec. L’augmentation rapide des taux d’intérêt a également eu de grands impacts sur les remboursements de prêts. 

À cela s’ajoute l’écart de rémunération entre la fonction publique québécoise et les autres employeurs. Chaque année, les données provenant de l’Institut de la statistique du Québec le confirment : les travailleurs et travailleuses des « autres secteurs publics » ont une rémunération globale supérieure. L’écart est de 14,3 % chez le personnel professionnel, selon les données de l’ISQ de 2022. La pénurie de main-d’œuvre actuelle ajoute également une pression afin que l’État puisse attirer et conserver les personnes professionnelles. 

Le régime d’assurance collective est également un enjeu important depuis longtemps, tant en ce qui a trait à son financement qu’aux protections offertes. Depuis quelques années, le coût des médicaments en forte hausse crée une grande pression sur les primes d’assurance maladie. Il devient alors primordial de mieux répartir les coûts.  

Dans plusieurs régimes, notamment celui de la fonction publique, la participation de l’employeur est minime : l’employeur ne paie même pas l’équivalent des taxes! Les personnes professionnelles assument la majorité de la facture. Si la part de l’employeur n’augmente pas, les personnes professionnelles continueront à assumer elles-mêmes l’augmentation des coûts des médicaments. Cela se traduit par une forte augmentation des primes d’assurance chaque année sans ajout de services. Cet enjeu prioritaire est abordé dans l’ensemble des négociations menées par le SPGQ. 

Plusieurs autres enjeux comme le télétravail et le régime de retraite sont également primordiaux.  

Est-ce avantageux ou non de négocier un enjeu à plusieurs tables? 

Dans un monde idéal, cela serait un avantage si un enjeu transversal pouvait se solutionner par des mesures adaptées au milieu de travail. Or, un organisme parapublic qui souhaite offrir des salaires concurrentiels pour attirer et maintenir le personnel qualifié doit se contenter des mêmes paramètres d’augmentation que les autres, même si ces augmentations sont nettement insuffisantes.  

Malheureusement, la négociation collective dans les secteurs public et parapublic s’effectue dans un contexte de forte centralisation : le Secrétariat du Conseil du trésor (SCT) veille à ne pas déroger du cadre financier établi par le Conseil des ministres. Que cela ait du sens ou non, il maintient la même position ferme sur les augmentations salariales à l’ensemble des tables de négociation. 

Le SCT veille aussi à minimiser tous les gains qui pourraient causer un précédent. Comme un vilain virus, il faut tuer dans l’œuf les initiatives qui pourraient améliorer les conditions de travail de trop de travailleuses et travailleurs de l’État! 

Cette crainte qu’une solution novatrice ne se répande à l’ensemble des conventions collectives limite trop souvent la conclusion d’ententes entre le SPGQ et la partie patronale. La négociation des modalités entourant le télétravail en est un bel exemple. 

Récemment, la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, formulait plusieurs reproches aux syndicats, dont celui de refuser de venir discuter à un forum qui « n’est pas un salon de thé » ni « une table de négociation », mais une « table importante ». À l’écouter attentivement, il y a lieu de se demander s’il n’est pas le temps pour le SCT de s’assouplir et de commencer à écouter, plutôt que d’imposer des ententes de type copier-coller. Il est grand temps de s’asseoir avec les syndicats afin de convenir d’une structure de négociation qui permettrait de s’entendre sur des solutions ayant du sens dans les organisations où on les implante. 


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