Les travailleuses du Québec méritent des emplois mieux payés! Monsieur Legault, il faut changer de cap!

Monsieur le Premier ministre,

À plusieurs reprises dans les derniers mois, vous avez affirmé que pour votre gouvernement, « la grande priorité, c’est de créer des emplois mieux payés ». À la veille de la Journée internationale des travailleuses et des travailleurs, nous devrions nous réjouir de cet apparent parti pris pour une amélioration du sort de la classe ouvrière! Mais vous êtes-vous assuré que les femmes puissent en profiter, elles dont le revenu d’emploi correspond à 78 % de celui des hommes ? Votre gouvernement a annoncé récemment des « investissements » pour créer de bons emplois en construction; de bons emplois dans les nouvelles technologies; de bons emplois dans l’aérospatiale, l’aluminium, l’électrification des transports, les sciences de la vie et l’exploitation des ressources naturelles. Le budget déposé en mars confirme que pour le gouvernement caquiste, la relance, c’est une affaire de gars et d’industrie. Vous réservez des miettes pour l’éducation à la petite enfance, les logements sociaux, l’action communautaire ou encore la protection de l’environnement. Quant aux services publics, après des années marquées par les mesures d’austérité et une dégradation des conditions de travail, les travailleuses s’attendent maintenant à des hausses salariales substantielles. Les femmes en ont assez de ce double standard. Elles représentent 50 % de la population québécoise et il est plus que temps que les politiques et mesures mises en place par le gouvernement le reflètent.

Cette recette nous a été servie à de nombreuses reprises. Une étude récente de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) montre que les femmes subissent de plein fouet les effets des crises, qu’elles soient sanitaire, économique ou écologique, et que les politiques de relance s’appuient toujours sur les secteurs masculins et souvent fortement producteurs de gaz à effets de serre. Un virage net vers une économie qui prend soin des personnes et de l’environnement – des secteurs où la main-d’œuvre féminine est majoritaire – est pourtant la seule façon de se préparer aux crises à venir, tout en améliorant la qualité de vie de l’ensemble de la population.

Il existe un outil à portée de main des décideurs pour les aider à prendre des décisions moins inégalitaires, c’est l’analyse différenciée selon les sexes et intersectionnelle (ADS+). Cette approche pour réduire les inégalités a été adoptée par plus de 180 États et gouvernements lors de la Quatrième Conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes à Beijing en 1995. Au Québec, le Secrétariat à la condition féminine a comme mandat de faire la promotion de l’ADS depuis près de 25 ans. Aujourd’hui, un an après le début d’une crise sanitaire qui a exacerbé les inégalités de genre, votre gouvernement refuse d’intégrer cette démarche d’analyse à ses politiques publiques les plus structurantes – comme le budget. Pire encore, la ministre responsable de la Condition féminine vient tout juste de déposer un plan d’action famélique qui propose de « sensibiliser » et « inciter » les ministères et organismes à appliquer l’ADS. Monsieur le Premier ministre, 25 ans après Beijing, nous ne sommes plus à l’étape de la sensibilisation, mais de l’action!

Les travailleuses du Québec en ont assez du statu quo. Elles en ont assez du mépris que votre gouvernement affiche à l’égard des « anges gardiennes » qui maintiennent les services essentiels à bout de bras. Nous exigeons que l’amélioration des conditions de vie et de travail des femmes du Québec devienne la priorité du gouvernement du Québec.

L’Intersyndicale des femmes

Laure Letarte-Lavoie, 4ème vice-présidente, Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)

Sophie Bédard, représentante provinciale à la condition féminine, Centrale des syndicats démocratiques (CSD)

Line Camerlain, 1e vice-présidente, Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Nathalie Morel, vice-présidente à la vie professionnelle et responsable politique du dossier de la condition des femmes, Fédération autonome de l’enseignement (FAE)

Shirley Dorismond, vice-présidente coresponsable secteur Condition féminine et responsable du secteur sociopolitique et solidarité, Fédération Interprofessionnelle de la santé (FIQ)

Maryse Rousseau, vice-présidente responsable de la négociation et de la condition féminine, Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)

Jessica Bourque, 2e vice-présidente, Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)