ARQ – Stratégies derrière les moyens de pression exercés par votre comité de négociation

Info-Négo : Volume 6 no 14 – 8 février 2023

Votre comité de négociation propose une rétrospective des plus récents événements. Elle permettra aux membres – et particulièrement aux nouveaux (nous en dénombrons 904 en 2022) – de mieux comprendre là où nous en sommes.

À l’hiver 2022, les professionnels de Revenu Québec (RQ) ont été sondés pour savoir s’ils étaient disposés à exercer des moyens de pression. 85 % des membres étaient prêts à exercer des moyens de pression. La pétition était le moyen de pression le plus populaire. Un peu plus de la moitié des professionnels sondés étaient tout de même prêts à exercer une grève de soir et de fin de semaine.

À la suite d’un important travail de mobilisation réalisé au printemps 2022 – en concomitance avec le dépôt d’offres patronales médiocres –, votre comité vous invitait à voter sur un mandat de grève de soir et de fins de semaine. En mai 2022, 93,4 % des membres ont appuyé ce moyen de pression.

Diminuer la capacité du système informatique

L’objectif de cette grève consistait à diminuer la capacité du système informatique de RQ en retardant les réparations et en empêchant l’employeur de procéder aux livraisons informatiques, particulièrement celles liées à la déclaration fiscale du printemps 2023. Cette grève a obtenu du succès jusqu’en décembre. Notamment, une importante mise à jour n’a pu être effectuée en novembre. Plusieurs informaticiens à la DGTI nous indiquaient que, vraisemblablement, le résultat souhaité serait obtenu sans devoir demander d’efforts supplémentaires à nos membres.

À la mi-décembre, ces mêmes informaticiens ont constaté que de nouvelles méthodes ont permis d’améliorer l’efficacité des travaux à la DGTI, et ce, malgré les moyens de pression en vigueur. Au retour des fêtes, nos moyens de pression continuaient de ralentir l’efficacité du service, mais, pour empêcher que la déclaration de revenus informatique soit produite, des moyens de pression plus lourds devaient être envisagés et mis en opération le 3 février. Face à ce revirement majeur, les options se résumaient à mettre en place des moyens de pression lourds traditionnels ou à tenter une nouvelle approche.

Augmenter la marge de crédit du SPGQ

Les défis du comité de négociation consistaient donc à identifier un moyen de pression qui parviendrait au résultat escompté, tout en étant financièrement acceptable pour les membres. Le principal écueil s’articulait autour de la marge de crédit du SPGQ, car la portion pouvant être utilisée par nos membres de RQ se limitait à 1,7 million $, l’équivalent de trois jours de grève.

Votre comité de négociation a ensuite effectué des démarches pour augmenter ce montant en sollicitant l’accord de l’ensemble des représentants du conseil syndical. Cet accord a été obtenu le 20 janvier 2023. En parallèle vous ont été présentés les moyens de pression que vous avez entérinés à 84,6 % entre le 10 et 14 janvier.

Refus de l’employeur d’identifier les services essentiels

Une nouvelle grève nécessitait une nouvelle entente ou un jugement déterminant les services essentiels. Fin décembre, les représentants du SPGQ ont interpellé l’employeur pour qu’il identifie les services jugés essentiels en cas de grève générale. Ils ont également fait valoir à l’employeur les services décrits lors de l’assemblée générale des membres : soit 80 % de la prestation de travail en mode rotatif avec une interdiction de procéder à de nouvelles mises à jour informatiques; seuls des correctifs étant permis.

Votre comité a précisé à l’employeur que la prestation de travail en mode rotatif était avantageuse pour RQ : elle lui permettait de rassurer la population comme quoi elle obtiendrait des services au ralenti, mais sans bris de services pendant la grève.

En janvier, le SPGQ constatait l’absence de collaboration de l’employeur pour identifier les services essentiels. Le 24 janvier, RQ n’avait transmis aucune information au SPGQ sur les services essentiels à la DGTI. L’employeur ayant refusé d’accepter la proposition de prestation de travail en mode rotatif, le SPGQ a soumis au Tribunal administratif du travail (TAT) l’avis de grève et sa proposition de services essentiels. Notons que, selon nos collaborateurs à la DGTI, le 24 janvier était la date limite pour déposer un avis de grève qui empêcherait les mises à jour informatiques liées à la TP1 informatique.

RQ cherche à contourner les règles

Toujours en janvier, les soupçons du SPGQ comme quoi RQ ne travaillait pas à établir une liste de services essentiels se sont confirmés. RQ cherchait plutôt à se servir de la détermination des services essentiels pour trouver une façon de poursuivre ses activités avec le moins de ressources disponibles. Les documents remis au TAT le 1er février durant l’exercice de médiation sur les services essentiels le démontrent.

Si les pensions alimentaires et la sécurité informatique sont uniquement considérées comme essentielles par le SPGQ, l’employeur tente de contourner ces règles en branchant toutes les applications informatiques disponibles à RQ sur celles des pensions alimentaires. En agissant ainsi, RQ veille à ce que n’importe quelle panne informatique génère une panne des pensions alimentaires.

En ce qui concerne la grève, le comité de négociation estime que seuls deux chemins peuvent s’avérer porteurs :

  • Soit nos membres travaillent suffisamment afin d’assumer financièrement les moyens de pression pendant une plus ou moins longue période.
  • Soit les activités de l’employeur sont paralysées, car seuls les « véritables services essentiels » sont rendus.
Un combat inégal

Le 24 janvier, et aujourd’hui encore, le syndicat n’est pas à armes égales avec l’employeur pour démontrer au TAT la non-conformité des services identifiés comme essentiels par RQ. Avant de se présenter au TAT, votre comité doit comprendre ce que font exactement les plus de 500 personnes sur la liste de l’employeur, préparer une argumentation selon laquelle le non- accomplissement de leurs tâches n’affectera pas un besoin essentiel, puis trouver et proposer des façons de rendre les services essentiels, même en cas de panne du système informatique. Pour cette raison, vos représentants ont évité à ce jour de demander au TAT un jugement sur les services essentiels.

Le TAT pourrait refuser la proposition syndicale (4 600 professionnels travaillant en rotation) et tenter de déterminer ce qu’il considère comme essentiel. Si le TAT retient généralement les arguments de l’employeur sur cet aspect, nous redoutons le faible impact d’une grève générale illimitée, dans la mesure où RQ pourrait fonctionner avec 500 ou 600 personnes pour assurer l’opérationnalité de ses systèmes informatiques. Une telle décision pourrait créer un précédent, car les tribunaux pourraient l’utiliser afin de déterminer les services essentiels à RQ, tant pour cette négociation que celles à venir.

Dès le 24 janvier, votre comité envisageait de retirer l’avis de grève devant débuter le 3 février si aucune solution n’était identifiée pour contourner cette problématique. Votre comité veut avant tout s’assurer, si vous perdez de la rémunération en raison de l’exercice d’une grève, de limiter vos pertes.

RQ conteste l’avis de grève

Le litige devant être tranché par le TAT le 1er février dernier portait sur l’interprétation des articles 111.0.23. et 111.0.23.1. du Code du travail que nous vous invitons à consulter pour mieux comprendre notre démarche.

Le seul argument soumis par l’employeur consistait à plaider l’illégalité de la grève du SPGQ, entendu qu’il n’avait pas mis fin à sa grève de soir et de fin de semaine.

Le syndicat a dit au TAT que l’avis auquel référait l’employeur était prévu à l’article 111.0.23.1 du Code et que ce dernier n’était exigible qu’en cas de retour au travail. Or, les professionnels n’entendaient pas revenir au travail. Ils désiraient plutôt accentuer leur grève. Concernant la confusion possible alléguée par l’employeur, le SPGQ répondait que le nouvel avis de grève ne pouvait pas être plus clair : à partir du 3 février à 16 h 30, tous les professionnels étaient en grève TOUT LE TEMPS. Cela incluait notamment le jour, le soir, la fin de semaine.

Les seules exceptions à cette grève totale concernent les services essentiels, lesquelles seraient balisées par un juge dans une décision ou dans une entente. L’employeur aurait ainsi le loisir de proposer les termes pour que ces derniers soient établis le plus clairement possible.

Pourquoi le SPGQ n’a-t-il pas produit d’avis de fin de grève avant de transmettre le nouvel avis

Les représentants syndicaux désiraient surtout éviter l’absence de grève en cours. Comme écrit plus haut, l’éventualité que le syndicat doive retirer son nouvel avis de grève était probable. Aussi, durant le mois de janvier, il devenait de plus en plus clair pour le syndicat que l’employeur prendrait tous les moyens juridiques pour rejeter la nouvelle grève. Le SPGQ a préféré jouer de prudence et conserver la grève de soirs et de fins de semaine qui comporte toujours une certaine efficacité.

La décision du tribunal et la révision judiciaire

Lors de l’audience, les discussions n’ont porté que sur la nécessité de mettre fin à une grève avant d’en déclencher une autre. Dans sa décision, le TAT n’a pas répondu aux arguments du syndicat ni à ceux de l’employeur. Pour cette raison, le SPGQ a décidé de porter la décision en révision judiciaire. Dans une certaine mesure, les avocats de l’employeur sont aussi insatisfaits du jugement. Une décision sur ce sujet sera utile pour le nouvel avis de grève.

Lors des audiences, le TAT n’a pas donné la possibilité aux parties de présenter leurs positions sur les motifs qui allaient soutenir sa décision à venir. Le SPGQ considère qu’il s’agit d’un déni de justice; il y voit d’ailleurs un autre motif pour demander une révision judiciaire. Si l’employeur avait contesté l’avis de grève sous prétexte qu’il n’était pas précédé d’une entente ou d’une décision  sur  les  services  essentiels,  le  SPGQ  aurait  notamment  répondu  que l’article 111.0.23. n’exige qu’une liste de services essentiels lors de la transmission de l’avis de grève, ce que le syndicat a pourtant produit dans les délais.

Prochaines étapes

Votre comité de négociation continue de présenter à l’employeur des façons d’améliorer vos conditions de travail. Votre comité cherche à contrer les subterfuges mis de l’avant par l’employeur pour ne pas négocier. N’ayez de crainte : votre comité trouvera des solutions et vous les présentera.

D’ici là, votre comité vous demande de ne pas céder à la panique ou à la frustration. Il importe de demeurer patient dans ce sprint final, bien qu’il s’étire depuis trop longtemps. Environ 10 % des membres qui participent aux activités syndicales (sondages, votes, etc.) s’opposent toujours aux propositions du SPGQ, quelles qu’elles soient. Ces personnes ont leurs raisons et nous les respectons. Les récents événements leur ont fourni une certaine ardeur pour dénoncer les moyens pris pour obtenir de meilleures conditions de travail. Toutefois, souvenez-vous du chemin parcouru ensemble (le dépôt patronal du 6 janvier par rapport au premier dépôt) : c’est la détermination des membres qui a permis d’y parvenir.

Lorsque votre comité estimera qu’il ne peut aller plus loin, soyez assurés qu’il ne manquera pas de vous le faire savoir. Mais nous n’en sommes pas là encore.

Le SPGQ vous invite à demeurer solidaires et à faire front commun envers un employeur qui bafoue les droits et les aspirations légitimes de son personnel. Si vous avez des questions ou des suggestions, n’hésitez pas à nous joindre à negoarq@spgq.qc.ca.

Votre comité de négociation

Valérie Côté
Denis Cyr
Vincent Roy-Léonard

Conseiller à la négociation

Martin Pinault

Responsable politique de la négociation

Jessica Bourque