Journée mondiale d’action en faveur du droit de grève : un droit encore bien vivant

Québec, 18 février 2022 – À une certaine époque, le droit de grève n’était pas reconnu par les autorités patronales ni même par les gouvernements. Le droit de se rassembler et de former des syndicats lui-même n’était pas non plus garanti. Il a fallu de grandes luttes pour les droits ouvriers pour former les bases du droit du travail. Depuis cette époque, bien des choses ont changé. Certains pourraient croire que le droit de grève est moins pertinent de nos jours, d’autant plus qu’il est très encadré.

Néanmoins, des négociations de convention collective sont engagées et des grèves sont déclenchées chaque année au Québec à des échelles plus ou moins grandes. Le droit de grève est encore bien vivant et pertinent afin de montrer la détermination des syndiqués face à la partie patronale. Dans la dernière année, nous avons pu constater la vitalité du droit de grève. Il n’y a qu’à penser à la grève du personnel d’entrepôt de la Société des alcools du Québec (SAQ) ou encore à celle des employées et employés des centres de la petite enfance (CPE). Dans un cas comme dans l’autre, ces actions ont eu pour effet de conscientiser le grand public à l’importance du travail des grévistes et à l’impact de celui-ci dans la vie des gens.

Déjà, le contexte sanitaire lié à la pandémie a éprouvé de nombreux parents qui ont dû garder leurs tout-petits à la maison lors d’éclosions et de confinements, et ce, au détriment de leur prestation de travail. Certains d’entre eux ont dû faire en soirée ce qu’ils n’avaient pu faire durant la journée lorsque leurs enfants étaient éveillés. Dès que les CPE ont pu rouvrir, d’innombrables parents ont poussé un soupir de soulagement. Si la mobilisation du personnel des CPE a reçu autant d’appui de la population, c’est que la valeur de leur travail était reconnue.

Dans le cas des employés d’entrepôt, la clientèle a pu constater des ruptures de stock dans de nombreuses succursales de la SAQ à l’aube des célébrations des Fêtes, période forte de consommation d’alcool — donc de revenus pour la société d’État.

Une chose est certaine, ces grèves et leurs conséquences ressenties par la population ont mis la pression sur la partie patronale afin de conclure rapidement les négociations et de prendre au sérieux les revendications de ces travailleuses et travailleurs. Ces mobilisations réussies prouvent qu’encore aujourd’hui, le droit de grève est un droit vivant et qui fonctionne.

Le droit de grève et le télétravail

Dans le contexte de télétravail dans lequel le personnel professionnel de l’État se trouve depuis le début de la pandémie, il y a lieu de s’interroger sur l’application du droit de grève. Est-il aussi pertinent que dans les cas des employés d’entrepôt de la SAQ et des employées des CPE qui ne peuvent pas travailler à distance? Une décision récente du Tribunal administratif du travail a justement jugé que les dispositions anti-briseur de grève prévues au Code du travail s’appliquent également au télétravail, ce qui est une première au Québec. Or, cette décision est déjà contestée.

Si le tribunal venait la confirmer, ce ne serait toutefois que le début. En effet, cette cause a mis en lumière le besoin de repenser le droit du travail et les dispositions garantissant le droit de grève en prenant en compte la nouvelle réalité du télétravail. Dans cette logique, il est essentiel que les organisations syndicales se mobilisent afin de garantir le droit de grève en situation de télétravail, et de manière plus large, qu’elles militent pour l’introduction de protections accrues dans le Code du travail pour toutes les personnes en situation de télétravail.

Line Lamarre

Présidente