Il y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion d’échanger avec une journaliste sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur : l’autonomie professionnelle. Cette discussion a mis en lumière un aspect troublant de notre réalité professionnelle : la forte influence des cabinets politiques sur le traitement des demandes d’accès aux médias.
En effet, la journaliste exposait la proximité entre ces cabinets et le personnel professionnel, suscitant légitimement des inquiétudes quant à une possible ingérence politique dans l’information diffusée au public. À ce moment-là, je partageais avec elle ma croyance selon laquelle les demandes médias ne bifurquaient pas invariablement vers les cabinets. Cependant, j’ai rapidement compris ma méconnaissance du sujet.
À la suite de la diffusion de l’article de la journaliste, des membres du SPGQ sont venus vers moi pour rectifier mes dires. Ils m’ont expliqué que les demandes médias étaient systématiquement soumises aux cabinets, retardant ainsi les réponses aux médias en attendant leur approbation. De plus, le personnel politique n’hésitait pas à modifier les réponses rédigées par le personnel des ministères pour y ajouter des messages qu’il juge pertinents, plus en phase avec les agendas ministériels.
Cette prise de conscience – aussi une excellente leçon d’humilité ! – a renforcé ma conviction quant à l’importance cruciale de l’autonomie professionnelle. En observant nos membres durant la pandémie de COVID-19, j’ai été un témoin privilégié de leur capacité à prendre des initiatives et à s’organiser efficacement, même dans des circonstances difficiles et totalement inédites.
En effet, dès le début du télétravail quasi généralisé au printemps 2020, nos membres ont su faire preuve d’une grande adaptabilité et d’une forte résilience. Malgré le manque de directives claires, ces femmes et ces hommes ont continué à fournir un travail de qualité, répondant aux besoins de la population, sans être physiquement présents – pour la majorité – sur leur lieu de travail.
Cela démontre bien que l’autonomie professionnelle est essentielle pour assurer un fonctionnement efficace de l’appareil gouvernemental. Une personne autonome sait ce qu’elle doit accomplir et s’organise en conséquence, sans attendre des instructions constantes de ses supérieurs. Cette capacité à prendre des décisions et à agir de manière autonome est la clé du succès dans un environnement de travail en constante évolution.
Bien que les cabinets politiques jouent un rôle important dans la formulation des politiques gouvernementales, leurs intérêts ne devraient en aucun cas interférer avec le bon fonctionnement de l’administration publique. Les décisions prises au sein des cabinets doivent être guidées par l’intérêt public, et non par des considérations partisanes ou politiques.
L’administration publique repose sur des principes de transparence, d’impartialité et d’efficacité, qui doivent être préservés à tout prix. L’autonomie professionnelle des personnes professionnelles est essentielle pour garantir que les décisions prises au sein de l’appareil gouvernemental soient fondées sur des données probantes et des analyses objectives, plutôt que sur des considérations politiques.
En encourageant et en préservant l’autonomie professionnelle de nos expertes et experts de l’État, nous contribuons à renforcer la confiance du public dans l’intégrité et l’efficacité de notre administration publique. C’est pourquoi il est crucial de veiller à ce que les intérêts des cabinets politiques ne compromettent jamais l’objectivité et l’indépendance de nos institutions publiques.
Je reste convaincu que l’autonomie professionnelle doit être encouragée et préservée à tous les paliers de l’État. C’est seulement en permettant à nos spécialistes de travailler de manière autonome que nous pourrons garantir un service public de qualité à la population québécoise.
Guillaume Bouvrette
Président du SPGQ